01 décembre 2020 ~ 0 Commentaire

Humanité et Biodiversité – Émissions de gaz à effet de serre : le Gouvernement doit justifier sous 3 mois que la trajectoire de réduction à horizon 2030 pourra être respectée

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Une « première » en matière de décision juridique sur le climat en France : le Conseil d’Etat a rendu le 19 novembre 2020 une décision obligeant le gouvernement français à préciser, dans les trois mois, les engagements qu’il allait prendre pour respecter les objectifs résultant de l’accord de Paris sur le climat.

Cette décision doit être lue attentivement et complètement : conformément à une interprétation juridique constante antérieure, elle ne reconnaît pas un caractère directement contraignant vis-à-vis du gouvernement de l’accord de Paris de 2015. La décision n’est donc pas fondée sur l’accord de Paris mais sur les décisions prises pour respecter cet accord, d’abord au niveau européen puis au niveau français, notamment avec la loi énergie-climat de 2019. Celle-ci fixe des objectifs chiffrés à atteindre en matière de réduction des émissions de carbone : neutralité carbone en 2050, et réduction des émissions de -40% en 2030 par rapport à 1990.

Les trajectoires correspondantes de baisses d’émission relèvent, par période pluriannuelles, de décrets d’application fixant la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) et la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).

Or les objectifs de la période 2016-2018 n’ont pas du tout été respectés, et le gouvernement s’est contenté dans le décret de mars 2020 relatif à la SNBC et à la PPE pour la période 2019-2023 de repousser aux périodes suivantes l’ambition d’amélioration du résultat, sans donner aucune indication ni sur les causes du non-respect de l’objectif, ni sur les moyens de faire mieux à l’avenir. Cette carence avait été relevée lors de la préparation du décret de mars 2020 d’une part par le Haut-Conseil pour le Climat, et d’autre part dans une résolution du Conseil économique social et environnemental (CESE), dont l’un des rapporteurs était le représentant de Humanité et Biodiversité au CESE. Elle est à nouveau soulignée comme un élément déterminant de la décision du Conseil d’Etat.

Respectant sa légitimité juridique par rapport à la légitimité politique du Parlement et du Gouvernement, le Conseil d’Etat ne se prononce pas sur le contenu de la loi votée, mais demande au Gouvernement de justifier, dans les trois mois, qu’il a bien pris les mesures permettant de respecter le dispositif législatif français mis en place pour la mise en œuvre de l’accord de Paris.

L’analyse qui sera faite au vu de la réponse du gouvernement dans trois mois sera importante : il faudra en effet comparer des obligations de résultat fixées par la loi en matière de trajectoire de baisse d’émissions à des moyens mis en place par le gouvernement (y compris des moyens réglementaires ou financiers, de même nature que ceux qui pourront résulter de la future loi climat, faisant suite de la convention citoyenne sur le climat, sans doute pas encore votée à cette échéance).

La décision du Conseil d’Etat a aussi apporté un élément nouveau en reconnaissant la recevabilité de la plainte de la commune de Grande-Synthe et de celles des villes de Paris et de Grenoble, toutes trois en raison de leur vulnérabilité au dérèglement climatique (commune littorale inondable, ou sensibilité particulière aux inondations et aux canicules).

Cette décision est importante, par la force contraignante qu’elle donne à des textes comme la loi énergie-climat et les décrets PPE et SNBC, qui ne peuvent plus être considérés comme des déclarations d’intention repoussant à plus tard les vraies décisions. Elle renforce aussi l’utilité pour des ONG comme la nôtre de participer activement aux concertations préalables à de tels textes, en y apportant toute l’attention nécessaire.

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