Petit pays, Gaël Faye, Grasset/Le Livre de Poche – Un roman très fort, un coup de coeur
Ma chronique sur Babelio : Gaby vit à Bujumbura, capitale du Burundi, avec sa sœur Ana, son père Michel, un français installé dans le pays, et sa mère Yvonne, une réfugiée tutsie rwandaise ayant acquis la nationalité française par mariage avec Michel. C’est le temps de l’insouciance. Gaby joue avec les copains de sa rue, Armand, Gino et les jumeaux, dans un quartier calme et prospère. Il découvre la lecture chez une voisine.
Mais la famille éclate ; la maman quitte le foyer conjugal. Un président d’opposition est élu au Burundi, puis renversé par un coup d’état militaire. La violence, insidieuse, gagne progressivement la rue, réveillant les vieilles haines entre entre Hutus et Tutsis. Puis un attentat tue le président du Burundi et celui du Rwanda, le prétexte choisi par les fanatiques hutus rwandais pour engager une véritable chasse aux Tutsis. Le Rwanda bascule dans l’horreur.
Gaël Faye se met dans la peau de Gaby pour décrire, avec les yeux d’un enfant, les horreurs des luttes tribales entre Hutus et Tutsis. Elles accompagnent la sortie de l’enfance des petits héros de cette histoire.
L’auteur nous livre là une fiction qui se lit comme le récit d’une tranche de vie ; à moins que ce ne soit l’inverse, un bout de biographie qui se lirait comme un roman ?
Il y a beaucoup d’amour, de tendresse, d’amitié, mais aussi des déchirements, pas seulement entre les adultes, de la violence, et un racisme sous-jacent. On rit avec ces gamins, on a peur pour eux, on pleure avec les familles… Le lecteur est immergé dans cette histoire, qui est aussi une tranche d’Histoire peu glorieuse pour l’humanité.
L’écriture est simple et fluide. Elle ne cherche pas d’effets de manche, se contente de soutenir la narration. Le résultat est limpide, plutôt facile à lire, sans tomber dans le pathos… Un roman fort ! Et si on est un peu curieux, on a envie d’en lire plus sur la tragédie vécue par ces deux petits pays, par exemple en lisant La stratégie des antilopes de Jean Hatzfeld.
Pour moi ce livre est un vrai coup de cœur. Je ne cherche pas systématiquement à lire les livres primés (et celui-ci l’a été de nombreuses fois !), mais cela faisait quelques temps que celui-ci me tentait, et je l’ai déjà offert plusieurs fois.
Je le lis donc avec bientôt quatre ans de retard, mais je ne regrette rien. Il n’a pas pris une ride, et comme les bons vins se déguste avec encore plus de plaisir en vieillissant.
Pour terminer, je ne résiste pas à l’envie de partager avec mes lecteurs quelques bonnes pages sur la découverte de la lecture par un pré-ado, vue par Gaël Faye. Je ne sais pas s’il a lui-même vécu cette expérience, mais je la souhaite à tous nos enfants et petits-enfants.