Affaire de Rugy : quel est l’intérêt pour Mediapart ?
Je l’ai écrit dans un récent article (à lire ici), Médiapart a clairement ciblé un individu, détruisant sa réputation et le poussant à la démission, plus que cherché à dénoncer un système encore insuffisamment transparent, réglementé et contrôlé, celui des moyens mis par l’Etat à la disposition de ceux qui le représentent.
Au plan de l’éthique journalistique, on peut à la fois critiquer l’objectif, détruire un homme qui n’est qu’un parmi tant d’autres à user des libertés que permet le système, et la méthode du feuilletonnage qui distille les révélations jour après jour sans jamais jouer carte sur table. Une méthode qui, n’en déplaise à Fabrice Arfi, s’apparente plus à celles de la presse people qu’au journalisme d’investigation…
Mais quels sont les intérêts de tels agissements pour Médiapart ? J’en vois deux. Le premier est structurel : Médiapart a besoin d’exister. En frappant fort, au risque de devoir parfois se déjuger plus tard (ce qui risque d’être le cas dans l’affaire de Rugy), et en feuilletonnant, il devient le faiseur de Unes des grands médias de presse, qui ne peuvent rester à l’écart au risque de passer pour complices. Ce n’est plus l’actualité qui fait la Une, mais Médiapart qui crée l’actualité ! (On lira utilement sur ce sujet, le petit livre « Comment s’informer ? » de Sophie Eustache aux éditions du Ricochet.)
Le second est plus conjoncturel. Médiapart sort une de ses plus grosses affaires, bien que fragile juridiquement, alors que les propriétaires du média pilotent une refonte de sa gouvernance financière. Refonte qui permettra aux fondateurs d’empocher de très belles plus-values, la valeur financière de Médiapart étant évaluée à plus de cinq fois la capitalisation initiale (Cf l’article du Monde des 2 et 3 juillet 2019) ! L’affaire de Rugy tombe à point pour entretenir l’audience et soutenir la valeur financière ! Et il est surprenant que cette coïncidence n’ait pas été relevée… Qui a peur de Médiapart ?